Forever Pavot – L’Idiophone
Un nouvel album réjouissant et tellement français !
Les occasions où on a la possibilité et le plaisir d’écouter un album français inventif à part entière sont finalement rares. On entend par » inventif à part entière » des disques écrits par des artistes français, interprétés en français et qui, dans leur esprit, sont le résultat d’un savoir-faire français singulier. Car il y a ceux qui cultivent un prè-carré estampillé « chanson française » battu et rebattu qui, souvent, oublie toute audace musicale. Et il y a les autres qui cherchent à échapper à la malédiction de la langue française en recourant à l’anglais. A la réserve près que, fréquemment, l’utilisation d’une syntaxe approximative, d’un anglais scolaire avec accent franchouillard donne l’impression d’écouter un karaoké.
« L’idiophone », troisième album d’Emile Sornin, qui évolue sous le pseudo Forever Pavot, s’affranchit de ces écueils. Ici, la langue française est utilisée naturellement, avec un art du texte qui prend celui du récit. Un récit un peu absurde parfois, décalé, ou alors laconique pour mieux mettre en exergue l’absurde de la réalité. Ainsi dans Les Informations, les énumérations de thèmes qui font l’actualité mettent en lumière tout l’absurde d’une société où l’information arrive de partout, sans aucune hiérarchie. « Guerre mondiale/Marseillaise/Recette de salade piémontaise » peut-on ainsi entendre. La langue sert aussi à donner de la chair à des sortes de saynètes cinématographiques décalées. Dans La Voiture raconte ainsi la cavale en Fuego d’un bandit de second ordre qui fuit au son de Stravinsky ou Debussy.
Musicalement, « L’Idiophone » est un vrai condensé de pop « à la française ». Il y a dans les arrangements de cordes un petit côté gainsbourien période « Melody Nelson », mâtiné de snororités et d’arrangements qui rappellent parfois les B.O de Vladimir Cosma (Dans la Voiture, La Mer A Boire). Des arrangements toujours mouvants, qui convoquent cuivres et cordes, le vocoder, pour donner vie à de petits courts-métrages intimes. « L’idiophone » a tout de l’album de l’artiste casanier, un peu obsessionnel, mais à l’esprit qui vagabonde et brandit sans cesse son érudition. Un régal.
Publié Sur https://www.indiepoprock.fr